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Hall of Apollon
8 mai 2006

Onirisme

Le soir approchant, les étoiles scintillent de plus en plus, en mémoire se répéte inlassablement la même phrase, aux formes agréables et aux sonorités envoutantes "Si tu pleures car tu as perdu ton soleil; tes larmes t'empêcheront de regarder les étoiles". Et chaque nuit, au dessus des nuages brumeux, de nouvelle lueurs apparaissent. Orion, Andromède, les constellations se mélangent et se divisent en des peintures sidérales. On voit de charmantes personnes danser une valse au rythme envoutant du vent sifflant dans les branches d'arbre. Puis la fatigue s'installe, et tout redevient triste et morne, gris et terne.

Alors, on retourne dans son petit lit douillet, se perdre dans les bras de Morphée. Au son d'une musique calme et reposante, on se laisse agréablement aller à l'ivresse nocturne. On parle, on chuchote, on murmure... Et dans un soupir de réconfort, on s'endort.

Et par-ci des fleurs qui chantent, par là des fées qui dansent, plus rien n'a de sens. C'est un spectacle à la fois intriguant et merveilleux. Les couleurs ne sont qu'une, et de chaque pétales d'une fleur qui meurt, des centaines d'autres de redressent sous l'oeil bienveillant d'une nébuleuse au front placardé "luminosité". On y voit même des oiseaux qui rit aux éclats, heureux, pour une fois, de ne pas être abandonnés. Ils volent, rayonnant de joie, tout comme l'astre du jour rayonne au coté de Cynthia. Jour, nuit, peu importe le temps, la logique et le sens n'ont pas leur place, juste la féerie et le spectacle.

Dans les plaines boisées, des escargots forment un choeur auquel se mèle les élans et les loups. Tout est musique et jovialité. Sous les grands arbres, tranquillement se prélassent des animaux et des champignons aux teintes dantesque. Les flammes violacées d'un incendie inexistant éclairent la lumière ombragée que font les tentures des nuages. Ce sont des voiles infinies qui recouvrent le monde d'une bienfaisante hilarité, tissées par des mains savantes.

Lune et Soleil vont se coucher dorénavant, seules les étoiles et le reste patientent, dans un festin nocturne aux formes ondulées. Non loin de là, sur les rivages ensablés d'une poudre d'escampette, les cygnes s'unissent sous la tendresse des vaguelettes. L'écume blanche s'étale et dans le ciel se fait l'actrice d'un rideau de paillettes. Les poissons virevoltent avec les rochers, qui ricochent, sourient et tournent comme des toupies. Les jambes étranges d'un pêcheur solitaire marquent la surface marine d'un parterre d'ampoules d'or. Et s'illuminent de plus en plus les côtes d'un monde étranger. Tant et si bien qu'apparait sous les feux de la rampe un gigantesque navire, de bois et d'hubnerite. Ses voiles sont immenses, des draps qui pourraient ensevelir l'univers tout entier, et dessus se battent un couple aux visages allongés et aux yeux protubérants. Son mat est un sabre brodé d'ébène et de soie, et son pont est une vaste plaine qui luit et reluit d'une austérité oppressante. C'est un grand navire, et il marche sur l'eau. De ses six pieds de géants, ils créent des raz de marée, il fabrique des séismes. C'est un bateau de guerre a n'en point douter.

Alors, les yeux rivés, la bouche grande ouverte devant ce batiment, périssent les joies et les enfants; poissons et roches se multiplient et se mélangent en d'étranges tapis; cygnes et sable, comme des autruches apeurées se cachent l'un dans l'autre. C'est la panique sur la côte du Lit-on-dort. Les étoiles s'éteignent, les fleurs se fanent, les arbres se recroquevillent, les chants deviennent hurlements, les oiseaux se retrouvent seuls... Ainsi s'avance le navire, et l'on voit alors apparaître des lunettes, des centaines de lunettes qui volent. Et a leur suite, des parchemins gribouillés, des tas de parchemins gribouillés. Alors s'ouvre une charge digne des teutoniques chevaliers du temps de Pendragon, les lunettes armées des parchemins par des liens invisibles se ruent à terre et sur le rivage, dans les plaines et les bois s'étend une gangrène glauque. Des champignons sordides poussent et asphyxient la terre, des lierres de fer rouillé s'enlassent autour des derniers chênes et prennent les oiseaux mourants pour des distractions pour enfants. D'un bout à l'autre des ailes, sales et blessés, les oiseaux pleurent, ils ne peuvent plus voler et s'échapper. Prisonniers d'un nouveau monde, ruine et chaos, comme si les cavaliers de l'Apocalypse venaient de diner: peste, famine, mort et guerre...

Soudain, dans la noirceur maléfique se répercute une litanie obsédante. Ce n'est pas une de ces prières d'églises qui louent un homme, ni un chant rendant hommage à un autre, c'est une apologie. Effrayante, angoissante, étroite, suffocante. L'air manque. La vision s'affaiblit, le souffle se fait faible. Tremblements. Une feuille sous la caresse du vent. Brise légère de monoxyde de carbone. Couverture gazeuse et étouffante. Raide. Droit. Science. Science, le fléau ténèbreux. Le fléau des Ages.

On se réveille! Maux de têtes et grimaces, le cauchemar est fini, mais il n'est que le milieu de la nuit. Un coup d'oeil par les fenêtres, les étoiles sont toujours là, magnifiques et brillantes, disséminés sans raison, au hasard de la providence. Et je me surprends à murmurer doucement: "Tout les voeux sont encore aux cieux."

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